Les droits des femmes et la crise climatique
Ce mini-cours sur les femmes et la crise climatique se veut un complément aux modules principaux du cours sur la Réforme féministe du droit de l'ANDF. L'ANDF est reconnaissante envers Rose Ghaedi pour son travail précieux en tant que principale autrice de ce mini-cours.
Partie 1 : Les femmes et la crise climatique
Les changements climatiques ont une incidence indéniable sur les écosystèmes, les individus et les communautés du monde entier. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) des Nations unies estime que la planète sera confrontée à des dangers climatiques inévitables au cours des deux prochaines décennies si le réchauffement se poursuit au rythme actuel, et que les conséquences seront plus graves, voire irréversibles, si ce niveau de réchauffement est dépassé. Les effets des changements climatiques étant de plus en plus graves et indéniables, la justice climatique devient un mouvement de plus en plus important. La justice climatique se réfère à l’idée que les différents impacts et les différentes responsabilités lié·es aux changements climatiques doivent être pris en compte. En effet, les changements climatiques peuvent avoir des impacts différents, et souvent plus graves, sur les groupes vulnérables. Les militant·es pour la justice climatique ont déjà souligné que le Nord est le principal moteur des changements climatiques et que le Sud est touché de manière disproportionnée par les aléas climatiques causés par ces changements. Cette conclusion est appuyée par le rapport d’évaluation du 6ème Cycle du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Quoique cette critique souligne avec précision les déséquilibres en matière de pouvoir, de capital et de capacité d’adaptation qui rendent certaines régions plus vulnérables aux effets des changements climatiques, elle ne reflète pas la vulnérabilité accrue de certains groupes du Nord – les femmes et les minorités – face aux conséquences des changements climatiques. Pour un résumé des dangers et des risques liés au climat au Canada, incluant les impacts différentiés sur les groupes vulnérables tels que les communautés autochtones, consultez le rapport 2022 de Santé Canada sur les changements climatiques.
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Partie 2 : Les critiques écoféministes de la crise climatique
Bien que les femmes soient touchées de manière disproportionnée par les changements climatiques, et bien qu’elles jouent depuis longtemps un rôle clé dans l’activisme pour la protection du climat, les problèmes et les perspectives des femmes ont historiquement été ignoré·es dans les efforts de lutte contre les changements climatiques. Les considérations de genre sont mentionnées dans certains accords internationaux liés au climat, mais elles sont souvent purement symboliques. Par exemple, l’Accord de Paris ne comporte que deux brèves mentions relatives au genre, qui se trouvent uniquement dans le préambule.
Le préambule de l’Accord de Paris stipule : « Conscientes que les changements climatiques sont un sujet de préoccupation pour l’humanité tout entière et que, lorsqu’elles prennent des mesures face à ces changements, les Parties devraient respecter, promouvoir et prendre en considération leurs obligations respectives concernant les droits de l’Homme, le droit à la santé, les droits des peuples autochtones, des communautés locales, des migrants, des enfants, des personnes handicapées et des personnes en situation vulnérable et le droit au développement, ainsi que l’égalité des sexes, l’autonomisation des femmes et l’équité entre les générations. »
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Partie 3 : L’activisme climatique aux niveaux international et fédéral
Les changements climatiques sont un enjeu mondial souvent traité à l’échelle internationale et fédérale. Le Canada a participé activement aux travaux internationaux sur les changements climatiques, notamment en tant que figure de proue de la création de l’Accord de Paris de 2015. L’Accord de Paris est un traité international juridiquement contraignant signé par 193 parties qui fixe des objectifs à long terme pour toutes les nations afin de limiter les effets des changements climatiques. Bien que l’Accord de Paris soit actuellement le traité international prééminent en matière de changements climatiques, il est loin d’être le premier. Le Canada avait déjà pris des engagements dans le cadre d’accords internationaux tels que la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques de 1992, la Conférence mondiale sur l’atmosphère en évolution de 1998, le Protocole de Kyoto de 1998 et l’Accord de Cancun de 2010. Néanmoins, le Canada a continué à polluer l’atmosphère et à contribuer aux changements climatiques.
Bien que le Canada soit juridiquement tenu de respecter ses engagements internationaux, il incombe aux gouvernements fédéral et provinciaux de mettre en œuvre ces promesses dans la législation, la pratique et la réglementation canadiennes. En 2021, le Canada a promulgué la loi sur la responsabilité en matière de carboneutralité. Bien que cette loi endosse les objectifs de réductions des émissions du Canada et oblige divers représentant·es du gouvernement à créer et à publier des plans et des rapports concernant les changements climatiques et les efforts de réductions des émissions, la loi ne crée pas d’obligations substantielles contraignantes. Néanmoins, cette loi pourrait devenir un nouvel outil pour contester les actions climatiques du Canada – ou leur absence. Le Canada a également mis en œuvre des mesures fédérales de tarification de la pollution par le carbone pour les entreprises et a annoncé un plafond d’émissions de pétrole et de gaz, bien que les détails du plafond n’aient pas été finalisés en septembre 2022.
À l’heure actuelle, la Loi canadienne sur la protection de l’environnement est la principale loi du gouvernement fédéral en matière de droit de l’environnement. Cependant, cette loi n’a pas été mise à jour de manière substantielle depuis sa création en 1999 et ne reflète pas la compréhension actuelle de la crise climatique. En 2022, plusieurs projets de loi visant à la rendre conforme aux engagements internationaux du Canada en matière de changements climatiques sont en cours d’examen dans le processus législatif fédéral.
L’un des développements importants dans la législation environnementale canadienne est la tentative de créer un droit à un environnement sain par le biais du projet de loi S-5, intitulé Loi sur le renforcement de la protection de l’environnement pour un Canada en santé. Le droit à un environnement sain existe actuellement dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, mais un droit fédéral couvrirait tou·tes les Canadien·nes et imposerait au gouvernement fédéral un devoir correspondant de préserver l’environnement. Un autre projet de loi, intitulé Une stratégie nationale visant à remédier au racisme environnemental, vise à créer un plan national pour lutter contre le racisme environnemental. En août 2022, ces projets de loi étaient toujours en cours d’examen au sein de l’assemblée législative fédérale; suivez leur évolution et les autres projets de loi fédéraux à l’étude en cliquant sur ce lien.
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Partie 4 : L’activisme climatique aux niveaux provincial/territorial et municipal
Étant donné que les gouvernements fédéral et provinciaux partagent la compétence en matière d’environnement, un militantisme écologique efficace doit se faire sur les deux niveaux de gouvernement. Bien que les changements climatiques soient un problème mondial, leurs répercussions peuvent souvent être extrêmement spécifiques et localisées, ce qui signifie que le militantisme municipal ou communautaire peut également être efficace pour atténuer des préoccupations climatiques spécifiques. Les militant·es intéressé·es peuvent en apprendre davantage sur la réforme du droit à divers niveaux de gouvernement en consultant les mini-cours sur les gouvernements provinciaux / territoriaux et les administrations municipales. Vous pouvez également consulter la carte d’action climatique du gouvernement du Canada, qui détaille divers projets locaux et provinciaux liés au climat dans tout le pays. Un nombre croissant de villes adoptent des plans sur les changements climatiques. Cependant, des groupes spécifiques sont parfois exclus ou insuffisamment pris en compte dans ces plans. L’action climatique au niveau municipal et à d’autres niveaux doit tenir compte des besoins des personnes handicapées, des travailleuses et travailleurs migrant·es, des personnes monoparentales et d’autres populations marginalisées.
Toutes les législatures provinciales et territoriales publient le texte des projets de loi en cours d’examen. Les militant·es pour le climat intéressé·es peuvent suivre les projets de loi de chaque session pour voir quels projets de loi environnementaux, le cas échéant, sont examinés à un moment donné.
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Quelles répercussions spécifiques des changements climatiques sont les plus menaçantes pour votre communauté ?
Peut-on entreprendre un travail au niveau local pour renforcer la capacité de la communauté à faire face à ces menaces ?
Qui sont les conseillers municipaux et les conseillères municipales de votre ville et quelle est leur position sur les changements climatiques ?
- Ont-iels pris des mesures pour faire face aux enjeux climatiques locaux ?
- Si ce n’est pas le cas, comment pouvez-vous attirer leur attention sur ces questions ?
Partie 5 : Les changements climatiques devant les tribunaux
Bien que le pouvoir législatif soit responsable de promulguer de nouvelles lois, le pouvoir judiciaire est souvent chargé d’interpréter et de faire appliquer ces lois. Par conséquent, les tribunaux constituent un domaine important pour la réforme du droit et le militantisme écologique. En fait, comme les crises liées au climat continuent de se multiplier, les tribunaux seront probablement confrontés à un nombre toujours plus élevé de litiges climatiques.
Si le litige climatique peut être un outil puissant de changement, il n’est pas sans inconvénients. Tout d’abord, les frais de justice élevés et l’inaccessibilité générale du système judiciaire peuvent décourager de nombreuses parties ayant des revendications valables de les faire valoir devant les tribunaux. De plus, les litiges sont toujours rétrospectifs de par leur nature – le litige climatique ne peut généralement contribuer à la réparation des dommages qu’après que ceux-ci aient été infligés, plutôt que de les éviter de manière préventive. Pour que le litige climatique atteigne ses objectifs de réforme juridique, les militant·es doivent développer des attentes raisonnables et des objectifs clairs.
Étant donné que les litiges climatiques peuvent avoir des répercussions importantes sur le droit et la politique de l’environnement au Canada, les organismes responsables du climat surveillent fréquemment les poursuites potentielles dans ce domaine. Les personnes intéressées par la réforme du droit peuvent consulter les affaires ci-dessous pour voir comment les militant·es peuvent utiliser les principes juridiques pour formuler des revendications liées aux changements climatiques à l’encontre du gouvernement :
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Mémoire de l’ANFD et des Ami(e)s de la Terre dans Renvois relatifs à la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre (en anglais)
Cour suprême du Canada 2021